Lorsque la mère de Benjamin Stora est décédée en 2000, il a retrouvé au fond du tiroir de sa table de nuit,
les clés de leur appartement de Constantine, quitté en 1962. Ces clés retrouvées ouvrent aussi les portes
de la mémoire.
La guerre est un bruit de fond qui s’amplifie soudain. Quand en août 1955, les militaires installent une
mitrailleuse dans la chambre du petit Stora pour tirer sur des Algériens qui s’enfuient en contrebas, il a
quatre ans et demi et ne comprend pas. Quelques années plus tard, quand ses parents parlent à voix
basse, il entend les craintes et l’idée du départ. Mais ses souvenirs sont aussi joyeux, visuels, colorés,
sensuels. Il raconte la douceur du hammam au milieu des femmes, les départs à la plage en été, le cinéma
du quartier ou passaient les westerns américains, la saveur des plats et le bonheur des fêtes.
Ces scènes, ces images révèlent les relations entre les différentes communautés, à la fois proches et
séparées, entre l’arabe quotidien de la mère et le français du père, la blonde institutrice de l’école publique
et les rabbins de l’école talmudique, la clameur des rues juives et l’attirante modernité du quartier
européen, une histoire se lit dans l’épaisseur du vécu.
Benjamin Stora a écrit là son livre le plus intime. A travers le regard d’un enfant devenu historien, il restitue
avec émotion un monde perdu, celui des juifs d’Algérie, fous de la république et épris d’Orient.
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